Avec le Bosquet du Théâtre d’Eau, Versailles réenchante ses jardins
Evénement ce jour dans le parc du château : le Bosquet du Théâtre d’Eau renaît enfin et sera ouvert au public dès demain, mardi 12 mai 2015. Sous un soleil magnifique (doit-on y voir la bénédiction de Louis XIV ?), au milieu de ce paysage en devenir créé par Louis Benech, l’eau a enfin jailli des fontaines de Jean-Michel Othoniel. Pour couronner le tout, la danse si chère au Roi Soleil s’est réinvitée dans les jardins, avec une création du L.A. Dance Project à laquelle l’extraordinaire Lil Buck a prêté sa grâce unique.
Nul doute que la recréation du Bosquet du Théâtre d’Eau marque une nouvelle étape dans la restauration des jardins de Versailles. Des voix vont s’élever, bien entendu, pour dire qu’une création moderne n’a pas sa place aux côtés de celles de Le Nôtre. Et pourquoi pas ? Il semble au contraire que la coexistence d’aménagements historiques avec des créations contemporaines soit une belle façon de rendre à Versailles la place qui fut longtemps la sienne, celle d’un haut lieu de recherche artistique où de nombreuses disciplines travaillaient, de concert, à faire rayonner la grandeur de la France. Certes nous sommes loin du Grand Siècle dans la forme, mais pas dans le fond, ni dans l’intention, et voir renaître ce bosquet constitue un moment très émouvant.
Le Bosquet du Théâtre d’Eau n’en est pas à ses premières modifications… Créé en 1671, il est réaménagé par Jules Hardouin-Mansart dès 1704, avant d’être plusieurs fois remanié, puis détruit sous Louis XVI, en 1775. Il perd alors son identité et devient le Bosquet du Rond Vert. En 1990, une tempête le ravage et exige sa fermeture aux visiteurs, tandis que la tornade qui balaie le parc en décembre 1999 l’anéantit totalement. Pourtant, à sa création, il était l’une des compositions les plus abouties des jardins de Le Nôtre, avec une multitude de fontaines dont les effets d’eau jouaient avec les architectures végétales et les treillages, dans une scénographie en trois perspectives inspirée du théâtre olympique de Palladio, à Vicence. Au cœur de cet archétype de décor baroque, l’eau se donnait en spectacle à travers des canaux et trois bassins ornés de coquillages et de groupes sculptés représentant des dieux enfants (Mars, Jupiter et Pluton).
C’est l’architecte-paysagiste Louis Benech qui a été choisi pour redonner vie à ce bosquet, à l’issue d’un concours international. Dans l’écriture de son projet, celui-ci s’est inscrit d’emblée dans la filiation de Le Nôtre, indiquant qu’il ne saurait restituer ce théâtre de verdure sans y adjoindre les fontaines qui faisaient le faste de la composition initiale. C’est ainsi que le sculpteur Jean-Michel Othoniel est entré, avec Louis Benech, dans l’intimité du Roi et de son illustre paysagiste. « Dialoguant avec Le Nôtre dans un langage qui rappelle de façon contemporaine l’histoire d’un roi disparu mais omniprésent, ils entrent ensemble, disent-ils, dans la longue ‘’généalogie’’ des métiers et des artistes de Versailles. Dans la calligraphie d’Othoniel, le Roi danse sur la ‘’scène’’ dessinée par Benech » indique Catherine Pégard, Présidente de l’Etablissement public du château, du musée et du domaine national de Versailles.
Louis Benech et Jean-Michel Othoniel ont conçu leur création à partir des vestiges de l’ancien bosquet. S’inspirant presque exclusivement de l’histoire du lieu, ils ont renoué avec son idée originelle : un théâtre de verdure où les effets d’eau jouent avec les structures végétales, dans une atmosphère festive. Dans la promenade végétale imaginée par Louis Benech, le visiteur passe de l’ombre des chênes verts à une grande clairière de lumière et d’eau. Pour raconter ce qui a été sans mythologie, mimétisme ou détournements, le paysagiste sème ça et là des allusions délicates au travail de Le Nôtre. Jean-Michel Othoniel, quant à lui, a réalisé trois sculptures fontaines monumentales : une composition baptisée ‘’Les Belles Danses’’, posée à fleur d’eau dans les bassins. Composées d’entrelacs et d’arabesques en verre de Murano, ces œuvres abstraites évoquent le corps en mouvement et s’inspirent directement des ballets donnés par Louis XIV.
Le Bosquet du Théâtre d’Eau est accessible en visite libre à partir du 12 mai 2015, tous les jours de 8h à 20h30 (sauf intempéries et événements exceptionnels). Il est situé à proximité du bassin de Neptune.
O’DE : la danse se réinvite dans les jardins de Versailles
En découvrant les fontaines baptisées ‘’Les Belles Danses’’, Benjamin Millepied, directeur du ballet de l’Opéra national de Paris, a eu l’idée de réinventer les pas de danse de Louis XIV. Avec le L.A. Dance Project, compagnie dont il est le directeur-fondateur, le chorégraphe a été invité à participer à la renaissance du Bosquet du Théâtre d’Eau. Les 10 et 11 mai 2015, lors des inaugurations officielles, les danseurs du L.A. Dance Project, exceptionnellement accompagnés du performeur Lil Buck, ont interprété O’DE, une pièce chorégraphique inédite spécialement créée pour l’occasion par Julia Eichten et directement inspirée par les fontaines du bosquet.